Retour sur le 91e Congrès de l’Acfas: points forts et commentaires des participants

À l’occasion du 91e Congrès de l’Acfas, qui se tenait à l’Université d’Ottawa du 13 au 17 mai 2024, le RFICS a eu l’occasion de s’illustrer de plusieurs manières :


Un point focal de ce dernier colloque était le panel « Savoirs sur le conseil scientifique : pratiques et recherches ». Ce dernier panel, modéré par le directeur général du RFICS Mathieu Ouimet, était composé de chercheurs et pratiquants issus de divers milieux :Lily Lessard, professeure titulaire au Département des sciences de la santé de l’Université du Québec à Rimouski, Anne-Marie Antchouey, présidente de la société gabonaise de cardiologie, Micheline Ayoub directrice exécutive de Sustainability in the Digital Age & Future Earth Canada, et Guillaume Beaulac, gestionnaire de l’équipe Stratégie comportementale et mobilisation au sein de l’agence de TI du Gouvernement du Canada. Partant de leurs expériences variées, plusieurs constats pertinents ressortent des échanges. Nous en présentons ici quelques extraits.

 

1. Enjeux de la pratique du conseil scientifique aux gouvernements

À la question « Quels sont, selon vous, les trois enjeux principaux de la pratique du conseil scientifique aux gouvernements, et pouvez-vous partager des exemples ou des expériences qui illustrent ces enjeux ? », plusieurs points marquants mentionnés par les experts présents méritent d’être soulignés.

Il ressort des interventions des panélistes que le conseil scientifique aux gouvernements présente trois enjeux majeurs. Le premier serait la nécessité d’un soutien hiérarchique solide pour son existence, comme illustré par le rôle de consultant interne de Guillaume Beaulac. Le deuxième semble être l’adaptation entre l’idéal et la réalité, reflétée dans l’utilisation pragmatique des données et la gestion des attentes, comme mentionné par Guillaume Beaulac, et le troisième enjeu serait la possibilité d’une communication efficace des résultats scientifiques malgré l’incertitude et l’évolution des connaissances, tout en évitant la politisation, tel que souligné par Micheline Ayoub.

Selon les panélistes, les décideurs font face à des enjeux complexes et la science n’est que l’un des dimensions prises en compte lors de leurs prises de décisions. Un autre enjeu souligné est le défaut d’exploitation du conseil scientifique pour anticiper sur les éventuels problèmes, parce que les conseils scientifiques ne sont sollicités qu’une fois qu’un problème survient, plutôt que dès le départ d’un projet. Aussi l’état des infrastructures de données et d’approches de mesures de l’impact serait-il une préoccupation, dans la mesure où les organisations sont souvent mal équipées en ce qui concerne les données recueillies et ce qui en est fait.

Pour Anne-Marie Antchouey, le défi réside aussi dans la délimitation du rôle du conseil scientifique : doit-on informer sans orienter, en fournissant simplement des données utilisables, ou doit-on offrir des solutions? La relation avec le décideur et la personne qui offre les conseils, ainsi que la clarté des attentes sont essentielles pour répondre à ces questions.

Tous les panélistes sont d’accord pour affirmer que ces défis exigent une approche multidisciplinaire, une adaptation du message aux publics et une conscience de la pertinence et de la responsabilité du conseil scientifique.

 

2. Le conseil scientifique doit-il formuler des recommandations d’actions ?

 À la question « Le conseil scientifique peut-il (et doit-il) se limiter à la communication de faits et résister à la formulation de recommandations pour l’action ? », les panélistes soulignent l’illusion de neutralité, puisque même la présentation des faits implique des choix, orientant implicitement vers des actions. Ils estiment que du moment où nous faisons des choix quant à ce que nous présentons (et nous n’avons pas le choix de le faire), nous faisons une recommandation pour l’action, et il vaut mieux vaut le savoir plutôt que de feindre la neutralité.

Lily Lessard reconnaît l’impossibilité d’une neutralité totale mais insiste sur la nécessité de comprendre les besoins des décideurs : « La personne ou le groupe qui porte le conseil scientifique doit être au fait des besoins et si possible, des réalités, des milieux preneurs. Le conseil scientifique s’inscrit alors davantage dans un échange bilatéral qu’un simple déversement de connaissances. Cet échange bilatéral permet aussi de mieux ajuster le message et le type de connaissances à partager », a-t-elle expliqué. Anne-Marie Antchouey met en garde contre la sélection des connaissances pouvant être politiquement exploitées, prônant une présentation complète. Micheline Ayoub souligne le devoir de fournir des options digestes, c’est-à-dire facile à comprendre pour quelqu’un n’ayant pas de formation dans le domaine. Si la personne qui reçoit les connaissances souhaite savoir quoi en faire, il faut alors, selon elle, suggérer des actions possibles.

En somme, l’idée de neutralité du conseil scientifique est à équilibrer avec son utilité pratique qui reste cruciale.

 

3. Les priorités de la recherche pour éclairer la pratique du conseil scientifique

La troisième et dernière question du panel, soit « Quels objets de recherche ou questions spécifiques de recherche sur le conseil scientifique considérez-vous comme prioritaires pour mieux éclairer les pratiques de conseil actuelles et futures ? » a également suscité de passionnantes discussions.

Pour Anne-Marie Antchouey, il pourrait être pertinent de « proposer une checklist de comment faire le conseil scientifique, dans l’esprit d’en augmenter la qualité ». Micheline Ayoub propose quant à elle une formation au conseil scientifique, ainsi que de la recherche sur l’impact de ce domaine.

Pour sa part, Lily Lessard suggère notamment de réfléchir à la façon de faire en contexte de crise lorsque les savoirs scientifiques sont incomplets, comme ce fût le cas lors de la pandémie de COVID-19.

 

Commentaires positifs des participants

Le RFICS a reçu plusieurs commentaires positifs de la part de personnes ayant participé à l’une ou l’autre des activités qu’il a tenues : 

« Un petit mot rapide pour [vous] remercier pour toute l’organisation du colloque du RFICS lors de l’Acfas. J’ai beaucoup apprécié mon expérience, les discussions ont été très stimulantes et les rencontres très intéressantes. Elles ouvrent déjà des opportunités de collaboration. » — Véronique Fournier, chercheuse étudiante, boursière du RFICS.

« Je tiens à vous remercier très sincèrement pour ce colloque qui a réuni plusieurs grandes personnalités du monde scientifique canadien et francophone. Je suis très heureux, [j’ai] appris beaucoup de choses et j’avoue que les échanges étaient très constructifs. Je remercie également tous les intervenants pour leurs observations pertinentes formulées sur la communication afin [de suggérer ]des améliorations. J’en tiendrai compte dans mes travaux à venir. » — Honoré Bolinde, chercheur étudiant, Université Senghor à Alexandrie.

 

Une 91e édition des plus réussies

Le Réseau tient à remercier tous les participants et les panélistes pour leur participation aux réflexions et aux discussions autour de la question du conseil scientifique.

Un merci tout particulier à l’Acfas d’avoir organisé cet événement qui, encore une fois, fut une réussite sur toute la ligne. Ce congrès a été des plus enrichissants, et permettra certainement d’enrichir la pratique du conseil scientifique dans les années à venir.

Facebook
Twitter
LinkedIn